Année : 1999 Durée : 10'

Genre : Un instrument

Effectif : Harpe

Détails : Commande du Festival de Gargilesse.
Création le 26 Août 2000 par Isabelle Moretti
Enregistrement Radio France par Isabelle Moretti (2000) et Pauline Haas (2010)


Édition : Alphonse Leduc

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Quatorze poignées d'argile


Notice :

La déesse Mami prit quatorze poignées d'argile.
Elle plaça sept poignées à droite.
Elle plaça sept poignées à gauche.
Au milieu elle posa une brique.
Ea, agenouillé sur une natte, ouvrit le nombril des figurines.
Des deux groupes, sept produisirent des hommes
Sept produisirent des femmes.
La déesse qui crée les destins les compléta par paire.
Mami dessina des formes humaines.

C'est ainsi qu'un très vieux texte sumérien - cité par Jacques Lacarrière dans son ouvrage
Au cœur des Mythologies - décrit la création de l'Homme.

Les coïncidences entre cette mythologie mésopotamienne - qui me passionne depuis l'enfance - et les circonstances de composition de mon œuvre pour harpe seule, m'ont particulièrement ravie.
La matière première de l'homme est l'argile: cette pièce m'a été commandée par le Festival de Gargilesse.
Sept poignées pour les hommes et sept poignées pour les femmes: sept pédales à la harpe...

Comme le matériau harmonique m'a été suggéré par l'accord même de l'instrument, et donc par l'utilisation modérée de ses sept pédales, je me suis attachée au nombre sept, hautement symbolique, pour construire toute l'œuvre à partir de sept accords, transposés sept fois.
Je les enchaîne les uns aux autres selon un processus d'engendrement d'un accord au suivant dans l'intention de limiter les changements de pédale tout en diversifiant les couleurs harmoniques.
En outre, structurellement, cette œuvre se présente sous forme de quatorze épisodes qui explorent les timbres les plus variés de la harpe.
Ces quatorze fragments sont disposés symétriquement de part et d'autre d'un noyau central dans lequel se mêlent tous les modes d'écriture adoptés dans l'œuvre: chuchotements, thèmes d'accords plaqués ou arpégés, mélodies à deux voix traitées sur deux plans différents - l'une résonnante et l'autre étouffée -, gammes arachnéennes, jeux sur les notes répétées, sons de "xylophone".

Je ne suis pas fâchée non plus que ce mythe sumérien de la Création ait traité l'homme et la femme à égalité...

Quatorze poignées d'argile est dédiée à Isabelle Moretti qui, avec une virtuosité éblouissante, sait faire entendre aussi bien la subtilité et la poésie du timbre de la harpe que l'ampleur sonore de cet instrument.